19 Juin 2012
A travers une scénographie à l’esthétique simple mais néanmoins troublante, riche d’un univers onirique, Sandra Moens nous livre « Dans Ma Chair ». Double résonance de ce titre, qui désigne à la fois le lieu du crime dénoncé par la jeune chorégraphe et le lien qui l'unit à la République démocratique du Congo.
Ainsi les origines biologiques se voient convoquées comme matériau et instrument d'empathie, vecteur d'un message politique. Sans un mot, la jeune femme évoque le viol et fait de sa propre chair, parcourue d'une vibrante émotion, le lieu privilégié de la transmission.
En choisissant méticuleusement les accessoires de sa performance, Sandra Moens a traduit cette complexité par une économie de gestes : vêtue d'un peignoir court qui laisse entrevoir son buste et découvre ses jambes, juchée sur des escarpins jaunes, elle s'avance dans l'espace affublée d'un masque de cheval.
Une fois postée sur la scène, elle entame une série de mouvements à la fois sensuels et inquiets, entre découverte et retrait. Cheval de bataille … cheval de Troie ? Car c'est bien cela le viol : une arme de guerre. Au-delà du drame et de la souffrance individuelle, c'est une façon de miner les corps, de les occuper pour détruire les structures sociales et les liens familiaux qui s'y fondent. Les femmes ou les enfants violés se voient rejetés par leurs proches, leur village, tandis que les agresseurs jouissent d'une totale impunité : en touchant aux corps, c'est toute l'organisation structurelle de la société que l'on attaque.
Sophie Grappin
Conception et Interprétation : Sandra Moens
Costume : Sandra Moens
Musique : Sandra Moens
Remerciements : Studio 55, Domoina Ranoro Ramarosaka, Emmanuel de Brantes, Jean Faucheur, Sarah Zhiri